- LA PROVENCE - 2 Mai 2002 -

L'art comme exutoire selon le peintre Tapiézo

A travers son exposition roussillonnaise, l'artiste Tapiézo présente un ambitieux projet d'art-thérapie, remède à l'échec scolaire et à la violence

D'ordinaire versés dans l'introspection, les artistes comptent pourtant dans leurs rangs quelques phénomènes pour qui l'art ne saurait se résumer à la seule observation de leur nombril.

Interroger Tapiézo sur son oeuvre c'est poser la question de savoir comment tourne le monde et s'exposer à une kyrielle de conseils sur la façon dont on peut, avec les seuls outils du peintre, permettre aux plus fragiles de s'exprimer. La peinture aurait-elle des vertus thérapeutiques insoupçonnées ?

"Assurément, d'autant que ma démarche se passe de langage, ce qui explique son succès auprès des publics français et étrangers. Elle concourt à développer l'autonomie de l'individu, lui donner ou lui rendre l'envie d'entreprendre et lui permettre de réussir. D'ailleurs, c'est plus qu'une démarche, c'est un véritable concept". Mais qu'est-ce qui fait courir Tapiézo ? " L'envie de rendre l'espoir à ceux qui auraient perdu cette confiance qui nous fait tous avancer, en s'exprimant à travers la peinture, de façon libre et personnelle".

Le peintre anime en effet depuis plusieurs années des ateliers autour de sa pratique, auprès des publics en difficulté comme des scolaires. Si le sable et la peinture ont été à l'origine du "style" Tapiézo, chacun est libre de traduire, à partir de ces seuls éléments, ses émotions propres, sans que le "maître" n'ait à intervenir à un seul moment dans le processus de création. "Je tente de faire passer l'individu de l'état d'assujetti passif à celui de demandeur actif", intervient-il avant d'ajouter "on accepte les choses plus facilement lorsqu'on est dans le "plaisir de faire", c'est ce qui explique qu'en l'absence de contraintes esthétiques, les personnes se libèrent d'elles même autour de leur "bac à sable". Chacun est maître de son projet". Quant au risque de se retrouver avec des clones de Tapiézo, le peintre dijonnais balaye la question d'un revers de main : "Ce qui m'appartient, c'est le concept, le bac à sable, lui, n'est pas une exclusivité Tapiézo, c'est un moyen d'expression universel que l'on a tous utilisé".

L'art comme rempart à la violence

Constatant que sa peinture a déjà reçu bien des honneurs, l'artiste initie au début des années 1990 ce que l'on appelle aujourd'hui la "démarche Tapiézo" et qui l'amène à travailler avec des établissements scolaires américains, belges ou français.

Là, les jeunes mettent en scène malaxent, dessinent et plongent les mains dans le sable et la peinture pour en extraire la substance essentielle : leur moi. Un procédé qui as pour ambition d'être un rempart à la violence, à la bêtise comme à l'oisiveté et pourrait bien faire des émules du côté des des grandes entreprises, là où la négation de soi est plus flagrante encore. Mais l'ambition du peintre ne s'arrête pas là et c'est désormais l'Education nationale qui est visée, forteresse imprenable que Tapiézo envisage de faire trembler pour amener les établissements scolaires à suivre sa démarche et s'équiper en conséquence. "L'Ecole du Futur" est déjà en marche.

- Olivier Meissel -